Film soutenu

Des idiots et des anges

Bill Plympton

Distribution : ED Distribution

Date de sortie : 14/01/2009

USA - 2008 -1h18 -1,85 - stéréo -35mm

Des Idiots et des Anges est une comédie noire sur le combat d’un homme pour sauver son âme.  Angel, homme égoïste et sans principes, s’éveille un matin avec des ailes sur le dos. En dépit de ses efforts renouvelés pour dissimuler ces nouveaux appendices, il voit son secret révélé aux yeux de tous. Bafoué, ridiculisé, Angel tente désespérément de se débarrasser des ailes du Bien, mais finit par combattre ceux qui voient en elle un moyen d’acquérir gloire et fortune. Son âme égarée saura-t-elle trouver le salut ?

Mention spéciale – Festival d’Annecy 2008
Festival du film américain de Deauville 2008

Réalisation Bill Plympton
Scénario Bill Plympton
Production Biljana Labovic
Animation Bill Plympton
Direction artistique Bill Plympton, Biljana Labovic
Montage Kevin Palmer
Son Greg Sextro
Compositing Lisa LaBracio
Mise en couleur Kerri Allegretta, Lisa Labracio
Traçeurs Kerri Allegretta, Lisa LaBracio
Musique Nicole Renaud, Corey A. Jackson, Tom Waits, Pink Martini, Moby
Administrateur John Holderried

Bill Plympton

Bill Plympton est né en 1946 dans l’Oregon. Fils de banquier, il a grandi dans une famille de six enfants (trois garçons et trois filles). Il reçoit en 1964 son diplôme de L’Oregon City High School. Pour éviter la guerre du Vietnam, il sert de 1967 à 1972 en tant que garde national. En 1968 il s’installe à New-York et suit des cours à la School of Visual Arts tout en travaillant comme cartoonist et illustrateur. Il est graphiste pour Cineaste, Filmmakers Newsletter et Film Society Review. Illustrateur pour The New York Times, Vogue, House Beautiful, The Village Voice, Rolling Stones, National Lampoon et Glamour. Il commence en 1975 un strip politique pour The Soho Weekly News, ‘Plympton’. En 1981, il travaille pour plus de vingt journaux.
Bill Plympton fait son premier film d’animation en 1983. Il s’agit de Boomtown, un dessin animé musical sur les absurdités des dépenses militaires, de la guerre froide jusqu’aux années 80. C’est avec ‘Your Face’, nominé aux Oscars en 1988, que démarre véritablement sa carrière cinématographique. Il travaille régulièrement avec MTV pour la série Plymptoons. Il fait alors son premier long-métrage ‘The Tune‘, entièrement auto-financé. Il réalise 30.000 dessins à lui seul. Après cette expérience il décide de passer à la fiction. Il réalise J.Lyle et Guns on the Clackamas.
En 1998, il retourne à l’animation pour son second long-métrage,’L’Impitoyable lune de miel! avec lequel il remporte le Grand Prix à Annecy. ‘Les Mutants de l’espace’ son troisième long-métrage d’animation, lui apporte le Grand Prix à Annecy pour la seconde fois. En 2004 il réalise Hair High. En 2007 il réalise Des idiots et des anges. En 2014 sort Les Amants électriques. Une fois de plus, Bill Plympton réalise tous les dessins lui-même, et est accompagné dʼune équipe qui travaille notamment sur un effet aquarelle particulièrement poétique.
Son dernier film, La Vengeresse, est aussi sa première co-réalisation, avec Jim Lujan. Une manière de se renouveler et dʼexplorer de nouvelles pistes à 70 ans !

FILMOGRAPHIE

Longs métrages: The Tune (92), J. Lyle (94), Guns On The Clackamas (95), Mondo Plympton (97), L’Impitoyable lune de miel!(I Married A Strange Person!, 97), Les Mutants de l’espace (Mutant Aliens, 01), Hair High (04), Des idiots et des anges (08), Les Amants électriques (Cheatinʼ, 13), La Vengeresse.

Documentaire: Walt Curtis, the Peckerneck Poet (98).

Télévision: Toon-O-Rama (85), The Edge (92-93), 12 Tiny Christmas Tales (01), Drew Carey’s green screen show (04), 10 days that unexpectedly changed America: Shay’s rebellion (06), Tiffany: Death on the Runway (12).
Courts métrages: Boomtown (85), Drawing Lesson #2 (87), Your Face (87), One Of Those Days (88), How To Kiss (89), 25 Ways To Quit Smoking (89), Plymptoons (90), Tango Schmango (90), The Wiseman (90), Push Comes To Shove (91), Draw! (93), Faded Roads (94), Nose Hair (94) How To Make Love To A Woman (95), Plympmania (96), Smell The Flowers (96), Sex And Violence (98), More Sex And Violence (98), The Exciting Life Of A Tree (98), Surprise Cinema (99), Can’t Drag Race With Jesus (00), Eat (02), Parking (03), Guard Dog (04), The Fan and the flower (05), Guide Dog (06), Shuteye Hotel (07), Hot Dog (08), The Cow Who Wanted to Be a Hamburger (10), Guard Dog Global Jam (11), Summer Bummer (12), Waiting for Her Sailor (12), Drunker Than a Skunk (13).

Si l’humour de Bill Plympton, pince-sans-rire et reposant sur la distorsion de l’espace, fonctionne d’habitude mieux dans ses courts-métrages, « Des idiots et des anges » déroge à la règle. Ce film à la fois beau et terrifiant, ce conte lugubre et drôle, est son long-métrage le plus accompli. Bill Plympton, moins préoccupé par les gags, raconte son histoire avec agilité et accorde un soin particulier à l’image. Il rend ce qui est complètement dingue élégant. Village Voice

Le film se déroule principalement dans un bar minable où le personnage principal a pris racine, entouré d’un barman mielleux, de sa femme blonde qui rêve d’une idylle et d’une vieille poule obèse et peu scrupuleuse. Le Bien combat le Mal dans une ambiance languissante à la fois arrosée et enfumée où se mêlent les cris et les coups. La comédie noire et sardonique, toute en nuance, de Bill Plympton, est son meilleur long-métrage à ce jour. Sa pantomime organique et dénuée de tout dialogue est appelée à élargir un public de fans déjà considérable. Variety


La genèse Des idiots et des anges

Je n’ai jamais trop bien su d’où me venaient mes idées. Si je n’avais qu’une source d’inspiration, mes films, j’en ai peur, seraient tous les mêmes. Ce peut être un article de journal (Les Mutants de l’espace), un morceau de musique (The Tune), une projection de moi-même (L’Impitoyable lune de miel !), des événements observés en me promenant dans la rue (Guard Dog), des pensées qui me sont venues simplement en rêvassant dans mon lit (Your Face) ou encore, comme dans le cas de Hair High, un rêve. Mais je n’arrive pas vraiment à me rappeler d’où j’ai pu sortir l’idée de base pour Des idiots et des anges.

Le premier souvenir que j’en ai remonte à 2005, alors que je me promenais en compagnie d’un étudiant au Festival de cinéma de Lille. Comme il me demandait quel serait le sujet de mon prochain film, je lui ai répondu, sans réfléchir, que cela parlerait d’un ange qui ne veut pas de ses ailes. Plus nous en discutions ensemble, et plus le concept commençait à vraiment me séduire. Cette nuit-là, dans ma chambre d’hôtel, j’ai commencé à explorer les possibilités narratives qu’offrait un personnage d’ange récalcitrant. Cela se passait alors que je venais d’en finir avec la production de Hair High, et j’avais beau penser que c’était un film génial qui allait me rendre riche, ça n’avait pas été une mince affaire. Le choix d’engager des acteurs connus m’avait coûté beaucoup d’argent, la location du studio était hors de prix et, pour faire face aux besoins d’une production dont le standing avait été un tantinet boosté par rapport à d’habitude, j’avais dû embaucher beaucoup plus de décorateurs et de traceurs. Pour finir, les délais n’avaient pas été respectés et le budget avait été dépassé. Il m’en avait coûté 400 000 dollars de ma poche pour produire le film, et afin d’être prêt pour le Festival de Sundance je m’étais en prime endetté.

Cette expérience a été source de pas mal d’angoisse et de stress, or si j’aime faire des films d’animation, c’est parce que c’est une aventure vraiment amusante à vivre. Alors bon, je ne me voyais pas rééditer l’épisode déprimant de Hair High — j’ai donc décidé que Des idiots et des anges serait en tous points à l’opposé de ce film. Là où Hair High était éclatant de contrastes et de couleurs, avec une animation très fluide, Des idiots et des anges serait monochrome et animé de façon plus basique. Là où Hair High bénéficiait de la participation d’acteurs connus pour les voix, la bande-son de Des idiots et des anges ne serait composée que de musique et d’effets sonores, sans aucun dialogue.

Hair High avait été réalisé avec des cellulos peints à la main, en 35 mm, aussi les dessins de Des idiots et des anges seraient-ils scannés pour être coloriés sur ordinateur. L’arrière-plan de Hair High avait nécessité la participation d’une dizaine d’illustrateurs — sur Des idiots et des anges, je m’en chargerais seul, juste avec papier et crayon.

Résultat, alors que le budget de Hair High s’élevait à environ 400 000 dollars, celui  de Des idiots et des anges avoisine seulement les 100 000 dollars. De prendre en charge moi-même la plupart des tâches de création — ce qui signifie qu’entre autres j’ai dû faire office tout à la fois d’auteur, de producteur, de réalisateur, de story-boardeur, de concepteur des personnages, de maquettiste, de créateur et dessinateur des décors, de chargé de l’animation et d’intermédiaire — m’a aidé à réduire considérablement les coûts de production.

Mon dernier court-métrage, Shuteye Hotel, a constitué une sorte d’échauffement, une expérience réalisée dans le style nouveau caractérisant Des idiots et des anges. C’est une technique que j’ai commencé à utiliser au lycée, puis à la fac, et aussi le style le plus basique et traditionnel qui soit, un simple crayonné sur papier avec quantité de hachures. Je n’avais jamais pu y recourir sur mes précédents films, vu que nous avions systématiquement utilisé un procédé de photocopie afin d’imprimer les images sur pellicule, mais aujourd’hui nous avons la possibilité de scanner le crayonné pour le coloriser sur ordinateur, sans rien perdre de la précision du dessin.

Donc, après avoir fait les dessins, j’estompe le trait avec un chiffon, puis je m’y remets et crayonne d’autres traits, que j’estompe à leur tour. Ensuite j’interviens à l’aide d’une gomme afin de dégager les grandes lignes. De fait, plus je corrige et redessine par-dessus l’image créée, meilleur est le résultat. C’est naturellement la texture particulière induite par cette méthode qui fait la force de l’image, aussi essayons-nous de nous en tenir à des couleurs aussi simples et diluées que possible.

Je remets les planches dessinées à ma chargée de production, Biljana Labovic, et avec son équipe de prodiges (Lisa, Kerry et Taylor), ils les scannent, les nettoient, les organisent et les colorent, l’ensemble étant finalement pré-monté à l’aide de Final Cut Pro. C’est alors qu’interviennent mon sonorisateur, Gregg Sextro, et mon nouveau monteur, Kevin Palmer, qui travaille chez Homestead Editorial. Tout au long de ce processus de fabrication, y compris même au stade du story-board, j’écoute de la musique afin de déterminer quel type de B.O. paraît réclamer l’histoire que je suis en train de raconter. Le film étant dépourvu de dialogues, je veux de la musique d’un bout à l’autre — presque comme un opéra, ou une longue suite de clips.

L’esthétique du film est très « Europe de l’Est »— un peu comme ce que pourrait faire Jan Svankmayer, ou David Lynch s’il s’essayait à l’animation —, très sombre et surréaliste. Pensant que la musique devrait du coup avoir un côté cosmopolite, j’ai sélectionné des morceaux de Pink Martini, Nicole Renaud et Tom Waits. J’avais pensé à Tom Waits dès le début, mais je ne savais pas comment le contacter. Par ailleurs je craignais qu’il ne demande un tarif exorbitant, ce qui n’est pas dans mes moyens — n’importe comment, il fallait tenter le coup.

Jim Jarmusch est un de mes amis, aussi je lui ai envoyé quelques extraits du film en lui demandant de les faire passer à Mr.Waits. Eh bien, à ma grande surprise, celui-ci a aimé le film et m’a fait dire qu’il me laisserait utiliser sa musique pour un prix fort raisonnable. J’ai un énorme respect pour lui en tant qu’artiste et, d’une certaine manière, sa philosophie se rapproche de la mienne. Je ne suis pas dans ce métier pour devenir riche (je m’en sors, disons), et son but à lui est de produire une oeuvre forte, de s’investir dans des projets qui le motivent. C’est l’art lui-même qui lui sert de moteur — j’aimerais que cette attitude soit plus répandue.